Les jeunes se livrent : « Que faire quand la société va droit dans le mur ? »

Parce que la Fabrique de Soi, l’école de devoirs de Laïcité Brabant wallon située à Tubize, fête cette année ses 15 ans, en 2018, nous avons décidé de célébrer, questionner et mettre en avant la jeunesse. Chaque édition du CALepin sera l’occasion pour quelques-uns d’entre eux de pousser un cri, un coup de gueule ou d’exprimer un grand bonheur. Notre numéro de mars vous invite à découvrir Piero Amand, un jeune homme passionné par la protection de l’environnement et militant au quotidien.

Que faire quand la société va droit dans le mur ?

Merci à Annabelle Duaut de m’avoir proposé d’écrire dans cette revue. C’est avec plaisir que j’offre ma contribution de jeune ado de 18 ans, qui se pose beaucoup de questions depuis un certain moment…

Quand on est ado, on regarde le monde avec les lunettes de l’utopie. Et puis… On se dit qu’on est vraiment tombé dans un monde de fous, où y a rien qui marche, où tout le monde fait des trucs qu’il n’a pas envie de faire et que le bonheur est aussi rare que les chaudrons d’or au pied des arcs-en-ciel. Du coup, on n’a pas beaucoup d’options.

Soit on se conforme au monde tel qu’il est, on « rentre dans le moule », et on ferme sa gueule. C’est ce qu’il y a de plus facile. Se contenter du monde tel qu’il est sans en demander grand-chose d’autre. Mais on peut aussi avoir envie de foutre le bordel, de tout péter et de gueuler un bon coup pour être sûr qu’on nous entende. C’est l’option « rébellion ». Ou encore, on ne sait pas trop, on hésite, on doute.

Je pense que je suis un mélange de tout ça. Né dans une famille ni-riche-ni-pauvre, j’ai des parents déjà assez engagés, intellectuels, et qui m’ont depuis toujours appris à me débrouiller, à être autonome et à me responsabiliser. Et depuis 2-3 ans, j’ai compris ce que ça voulait dire être « responsable ». Ça veut dire savoir ce qu’on fait, en être conscient, et réfléchir aux conséquences de ses actes. Et c’est là que tout commence…

Je me pose des questions, sur le sens de la vie, sur la société, ses dérives, ses avantages, sur mon rôle dans toute cette histoire. Et en 2015, je vois le film « Demain ». WAW. Gros déclic. Au lendemain de la Cop21, où tout le monde avait une lueur d’espoir par rapport à la résolution du réchauffement climatique, je vois un film qui nous dit qu’on ne doit rien attendre des politiques et que les citoyens, quand ils se mettent ensemble, peuvent trouver des solutions. Quel enthousiasme…

Alors je m’y mets. Je ne mange plus de viande ou très peu, on commence un potager en permaculture, je m’intéresse au mouvement des Villes en Transition, puis je vais voir chez Greenpeace ce que je peux faire. Sur un coup de tête, je lance une pétition pour le climat, ensuite je me fais membre du parti Ecolo… Mais il manquait un ingrédient dans tout ça : je ne comprenais pas pourquoi et comment l’humanité en était arrivée là. Comment une espèce, à elle seule, pouvait être capable de coloniser chaque bout de planète, de déclencher une sixième extinction de masse des espèces, de réchauffer le climat à une vitesse jamais vue, de faire la guerre pour du fric, ou encore d’épuiser les ressources naturelles à un rythme exponentiel ?

Que de questions, qui me hantent et parfois me dépriment, car je n’y trouve pas de réponse. Ah si, une : « L’humain est une grosse merde ». Et puis je tombe sur un bouquin. Ma mère ne voulait pas me l’acheter, mais j’ai insisté. Il faut dire que le titre ne transpirait pas la joie… « Comment tout peut s’effondrer ». Une claque. En 300 pages, les auteurs (Pablo Servigne & Raphaël Stevens) nous exposent les conséquences qu’auront sur notre société le cocktail réchauffement climatique / extinction des espèces / fin du pétrole / crises financières / épuisement des ressources.

Au final, je me dis que la transition sera sans doute plus douloureuse que prévue… Pessimiste ? Ben non en fait, juste lucide. Car ce ne sont pas les seuls à évoquer cette forte probabilité. De nombreux scientifiques et chercheurs partagent le même constat. Et en 1972 déjà, le rapport « Les limites à la croissance » nous avertissait sur les conséquences d’une croissance exponentielle sur une planète finie.

Et si voir la réalité en face, accepter qu’il y aura une fin à notre société industrielle, de sur-consommation, qui détruit les écosystèmes et épuise les humains, nous permettait de mieux rebondir ? Car après l’effondrement, ce ne sera pas le néant ! Il restera des humains et un nouveau monde à construire. En somme, c’est comme si nous naissions une seconde fois, mais cette fois-ci dans un monde dont nous sommes les acteurs, et non plus les spectateurs. On recommence d’une page blanche en fait ! Bon, il y aura une zone de turbulences à traverser, c’est vrai. Et il faut s’y préparer aussi.

Finalement, prendre les problèmes à bras le corps, essayer de les comprendre, et mesurer notre capacité d’action – non pas pour changer le monde, mais pour en construire un nouveau – c’est ça notre rôle aujourd’hui, en tant que citoyens. Alors, qu’est-ce qu’on attend ?

Pour retrouver le blog de Piero, c’est par ici : https://journaldecologiecritique.wordpress.com/

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